samedi 6 octobre 2012

43.000 enseignants à recruter: l'usine à gaz de Vincent Peillon





C’est une véritable usine à gaz qu’est en train de mettre en place le ministère de l'éducation pour parvenir à recruter 43 000 enseignants l'an prochain. Après des années de suppressions de postes, le ministère a en effet annoncé la semaine dernière le recrutement record de 43 000 enseignants pour la seule année 2013. C'est à comparer aux 16 000 postes offerts au concours l’an dernier.

Pour atteindre ce chiffre, le ministère entend puiser dans deux viviers différents en organisant deux vagues de concours à quelques mois de distance, comme nous l'annoncions dès le mois de juillet. Le recrutement des profs qui feront la rentrée 2013 se fera en deux vagues : 22 100 postes pour la première, dont les épreuves auront lieu cet automne, comme habituellement. Et une seconde session au mois de juin, cette fois pour les étudiants de première année de master, alors que les concours ne sont normalement ouverts qu’aux étudiants de M2 depuis la réforme de la masterisation.

Cette seconde vague de recrutement en juin portera sur 21 350 postes, soit une anticipation de presque six mois des épreuves d’admissibilité du concours de 2013. Le but pour le ministère est que, dès la rentrée prochaine, ces enseignants soient en partie sur le terrain.

Le ministre Vincent Peillon© NC

Première étrangeté de cette organisation : les 21 350 admissibles de juin enseigneront dans les établissements en tant que contractuels puisque, n’étant pas encore admis (leur admission ne se fera qu’en juin 2014 !), ils ne peuvent avoir le statut de professeur-stagiaire comme ceux qui viennent d’être reçus au concours de façon classique. Mais combien, un an plus tard, seront recalés ? Mystère. Il se pourrait, selon ce qui a pu filtrer de la rue de Grenelle, bien peu diserte sur le sujet, que pour la quasi-totalité d'entre eux, les étudiants admissibles soient finalement admis un an plus tard, ce qui rendrait un peu ubuesque des épreuves d’admission et risquerait aussi de fragiliser fortement le sens même du concours.


Pourquoi ne pas avoir mis en place, comme habituellement, les épreuves d’admission juste après l’admissibilité, au mois de juillet par exemple ? « Il aurait fallu changer d’ici là tous les textes sur le sujet, ce qui était impossible dans de tels délais. Là, finalement, il ne s’agit que d’anticiper de quelques mois les épreuves d’admissibilité des concours 2013 », assure un bon connaisseur du dossier.
Les explications budgétaires ne sont peut-être pas totalement étrangères à ce choix puisque ces « recrutés » ne seront que contractuels. Quelle sera d’ailleurs leur rémunération ? Là encore le flou est total.
La première vague de recrutés, sur les anciens concours, ne bénéficiera toujours que de trois heures de formation hebdomadaires quand ceux recrutés six mois plus tard seront, eux, déchargés pour deux tiers de leur temps pour aller se former dans les nouvelles écoles du professorat. Ils ne travailleront donc effectivement dans les classes que six heures. Il semble du coup peu probable que leurs salaires soient alignés sur la grille habituelle des contractuels car, à raison de six heures hebdomadaires devant les élèves, des heures payées quasiment au niveau du Smic horaire, leurs fins de mois seraient trop acrobatiques. Sans parler de l’attractivité pour un tel recrutement dans ces conditions !
C’est d’ailleurs la grande inquiétude du ministère, même si officiellement le ministre assure qu’il n’y aura aucun problème. La rue de Grenelle redoute en effet que cette organisation, pour l’instant illisible, ne suscite pas assez d’enthousiasme chez les étudiants pour pourvoir tous les postes dans des conditions et à un niveau satisfaisants. L’an passé, par exemple, plus de 700 postes au Capes n’ont pas été pourvus, faute de candidats d'un niveau suffisant.
Dans l’entourage de Vincent Peillon, on confirme que les emplois d’avenir professeurs, ces emplois aménagés pour pouvoir préparer les concours d’enseignement, ont été, par amendement, ouverts également aux étudiants de première année de master, alors qu’ils devaient à l’origine ne concerner que ceux de deuxième année de licence cette année. Mais comme les signatures de ces contrats n’interviendront pas avant le mois de janvier, et que les concours ont lieu en juin, on voit mal comment ils pourraient constituer un levier réel pour faire naître des vocations…
En ce début d'octobre, beaucoup de choses restent donc encore à trancher et le temps presse pour convaincre les étudiants de passer les concours en juin. Sur le terrain, la plupart des étudiants n’ont d’ailleurs toujours pas entendu parler de ce nouveau concours.

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