jeudi 9 février 2012

Les CUI illégaux pullulent…



… avec la complicité de Pôle Emploi qui ferme les yeux en publiant les offres, et celle du gouvernement qui en fait la promotion pour embellir ponctuellement les statistiques officielles.

Voici deux exemples emblématiques et récents d'offres en CUI-CAE proposées par Pôle Emploi bien qu'elles soient illégales.

VIOLATION DE L'ARTICLE L1242-1 DU CODE DU TRAVAIL

Secrétaire
(Code métier ROME : M1607)

CLASSEMENT DIRECTION GÉNÉRALE SELON NOMENCLATURE/SECRÉTARIAT CLASSIQUE (STANDARD TÉL, FRAPPE COURRIERS)/ SUIVI CONTRATS D'ASSURANCE/SUIVI ADMINISTRATIF CHANTIERS EN COURS EN LIEN AVEC LE CHARGÉ MISSION HSCT/ TÂCHES COMPTABLES. CDD RENOUVELABLE. POSTE RÉSERVÉ AU PUBLIC ÉLIGIBLE AU CUI-CAE.

Type de contrat de travail : CONTRAT A DURÉE DÉTERMINEE DE 6 MOIS
Expérience : DEBUTANT ACCEPTÉ **VÉRIFIER VOTRE ÉLIGIBILITÉ CUI-CAE**
Horaires : 35H00 HEBDO
Salaire indicatif : MENSUEL 1 600 Euros (10 495,31 F)
Taille de l'entreprise : 1000 A 1999 SALARIES
Profil Exigé : De formation Bac+2, type BTS en secrétariat
Maîtrise du pack office (Word, Excel et Power point) / Rigueur, discrétion, faculté d’adaptation / Goût des chiffres
Cadre de l’emploi : CAE de 2 ans, à temps plein, rémunération selon la convention collective.

Il est flagrant que, dans ce cas, le CUI-CAE se subsitue à un emploi permanent. Or, Selon l'article L1242-1 du Code du travail, «un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à une activité normale et permanente de l'entreprise». Les CUI, qui sont des CDD, relèvent aussi de cet article.

Pôle Emploi, qui use à loisir de ces contrats, a été assigné aux Prud'hommes pour violation de cet article. On attend le verdict... Que ce soit pour ses plateformes téléphoniques ou ses services de traitement du courrier, Pôle Emploi bafoue sans vergogne le Code du travail alors qu'il devrait être exemplaire en la matière.

LE CUI-CAE NE DOIT PAS SERVIR À REMPLACER UN SALARIÉ ABSENT

Ici, c'est à nouveau Pôle Emploi qui plonge dans l'illégalité en tant qu'employeur à la recherche de Bac+3 à Bac+5 à un prix imbattable :

Conseiller/conseillère en insertion professionnelle
(Numéro de l'offre 837901M)

EN TOUTE AUTONOMIE, VOUS ACCUEILLEZ ET RENSEIGNEZ LES JEUNES DIPLÔMÉS. VOUS ANIMEZ LES ATELIERS TRE, VOUS ACCOMPAGNEZ INDIVIDUELLEMENT LES JEUNES DANS LEURS DÉMARCHES, PROSPECTEZ LES ENTREPRISES ET RÉALISEZ LE SUIVI ADMINISTRATIF. DÉPLACEMENTS EN ARDÈCHE. REMPLACEMENT CONGÉ MATERNITÉ.

Type et Nature du contrat : CONTRAT A DURÉE DÉTERMINÉE DE 6 MOIS / CUI-CAE
**MERCI DE VÉRIFIER VOTRE ÉLIGIBILITÉ**
Expérience : EXIGÉE DE 6 MOIS
Formation/Diplôme demandés : Bac+5 et plus ou équivalent Ressources humaines souhaité
Bac+3, Bac+4 ou équivalent Sciences humaines exigé
Permis : B - Véhicule léger exigé
Lieu de travail : DRÔME
Déplacements : PONCTUELS RÉGIONAL
Salaire indicatif : MENSUEL 1 435 Euros (9 412,98 F) + CHÈQUE REPAS
Horaires : 35H00 HEBDO

Cette offre pour un poste visant à remplacer une conseillère en congé maternité est parfaitement illégale et Pôle Emploi devrait le savoir, puisque c'est écrit noir sur blanc dans la Fiche 1, en page 3 du Guide 2011 de l'employeur des contrats uniques d'insertion, à la rubrique “Définition des tâches confiées aux bénéficiaires” du CUI-CAE réservé aux employeurs du secteur non marchand.

Mais il n'y a pas que Pôle Emploi qui méprise ce règlement : la CAF aussi !

LE CUI-CAE EST ASSORTI D'UNE OBLIGATION DE FORMATION
Ceci ne figure pas dans les offres qui demandent, au contraire, de plus en plus des candidats diplômés, expérimentés voire autonomes : bref, totalement opérationnels.

Pourtant, les contrats uniques d'insertion doivent être obligatoirement assortis d’«actions de formation» en lien avec «la réalisation du projet professionnel» des intéressés afin de favoriser leur réinsertion dans l'emploi. Mais dans plus de 60% des cas, l'engagement n'est même pas respecté. Or, ce manquement de l'employeur peut être dénoncé devant les Prud'hommes et lui coûter cher.

Le cas de l'Education nationale est emblématique : actuellement, des employés de vie scolaire (EVS/AVS) attaquent l'Etat en masse via les Prud'hommes pour non respect de cette obligation. ET ILS GAGNENT. Si vous êtes dans ce cas et souhaitez vous lancer dans la lutte collective, contactez le SNUipp-FSU, la CGT Éduc'action ou Sud Éducation.

Le gouvernement est 100% responsable

Quand on voit les exigences des employeurs qui font appel à ces contrats jetables en matière de diplômes, d'expérience et de permis de conduire, on se demande où est passée la vocation première des CUI, censés favoriser la réinsertion professionnelle de «personnes rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi»...

Pôle Emploi est complice, puisqu'il ferme les yeux sur la légalité de ces offres et en abuse lui-même. Mais le gouvernement est, lui, totalement responsable de ces dérives, puisqu'il a conçu ces contrats comme autant d'aubaines et en fait la promotion afin de limiter les mauvais chiffres du chômage. En vue des élections, il a mis les bouchées doubles, fixant à Pôle Emploi des objectifs de placement qui ne trompent personne, concentrés sur le premier semestre 2012 afin de limiter la casse avant l'élection présidentielle.

Pôle Emploi et l'Etat agissent de concert dans cette vaste opération de dévalorisation du travail. Pour les employeurs du public, laminés par les réductions d'effectifs auxquelles les contraint la RGPP, ces contrats grassement subventionnés sont devenus un "choix économique" attisé par la course à "la baisse du coût du travail", véritable obsession qui nous mène au désastre.

Et les candidats aux abois (plus ou moins forcés de les accepter), quand ils n'ignorent pas ces clauses élémentaires, n'ont souvent pas le courage de les dénoncer à Pôle Emploi (qui les publie) ou à l'Inspection du travail alors qu'il le faudrait. De même, aucun média mainstream ne se penche sur ce scandale. Ainsi, l'illégalité perdure. C'est bien dommage.

SH

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