jeudi 8 décembre 2011

Cinq Baffes (Dans La Gueule Des Pauvres), Grand Maximum



Mettons que tu sois le chef du gouvernement le plus tordu des soixante dernières années, et que t’aies planifié de mettre encore une tassée demi-dizaine de grandes baffes dans la gueule des pauvres, histoire de bien montrer que t’es toujours à l’hauteur des ambitions de ton chef, le président des riches [1] : tu sais que tu vas t’heurter à une vraie difficulté, qui est que les pauvres [2], nonobstant que tes journaleux d’accompagnement leur répètent quotidiennement que c’est pour leur bien que tu les lattes, ne vont sans doute pas beaucoup apprécier que tu leur mettes (encore) cinq grandes baffes dans la gueule sans leur laisser le temps de se remettre de la grosse branlée que tu leur as infligée l’an dernier avec la réforme des retraites - et vois-tu pas que les traîne-misère, sortant de l’ahurissante permissivité où les maintiennent tes journaleux d’accompagnement, se mettent en tête de rendre coup pour coup, et de t’administrer, à leur tour, force gifles, suivant l’efficace méthode modélisée dans la toute fin des années 1780 ?

(Ça serait-y pas sot ?)

Qu’est-ce tu fais, pour contourner cette vraie difficulté ?

Tu narres que cette nouvelle distribution d’encore cinq grandes baffes dans la gueule des pauvres, contrairement à ce qu’en pourraient penser les intéressé(e)s, montre bien ton profond souci de les protéger contre les duretés de la vie, puisqu’en vérité, ils sont passés tout près de se manger, non pas cinq, mais dix grandes baffes, et ne doivent qu’à ton intervention la commutation de leur punition initiale en quelque chose de tout à fait acceptable - de sorte que tu serais pas contre qu’ils te témoignent éventuellement un peu de reconnaissance, m**** alors, n’oubliez jamais que si je n’avais pas été là, c’était direct les urgences, tas d’ingrat(e)s.

Concrètement : tu t’invites chez Poujadasse, qui brûle de servir, et t’annonces que, toi vivant, tu laisseras personne mettre encore dix grandes baffes dans la gueule des pauvres - et que personne n’insiste, surtout, ou tu t’énerverais.

T’ajoutes : dix grandes baffes supplémentaires dans la gueule des pauvres, ça serait tout simplement pas humain - et moi, monsieur Poujadasse, vous me connaissez, j’ai justement l’humanité chevillée dans le brushing, n’oubliez pas, je vous prie, que je viens du gaullisme social.

Tu conclus : ce que je crois, monsieur Poujadasse, c’est que trois ou quatre grandes baffes dans la gueule des pauvres suffiraient amplement.

Ou cinq, allez, à l’extrême limite : cinq, ça me paraît bien - puis ce n’est pas non plus comme si nous avions le choix, c’est la crise, monsieur Poujadasse, et nous devrions chanter de joie de n’avoir à endurer que cinq minuscules petites grandes baffes dans la gueule des pauvres.

Mais dix ?

No fucking way, je laisserai(s) pas faire - ça serait beaucoup trop.

Puis tu te casses, et le lendemain matin, quand tu te réveilles, t’as l’insigne joie de constater que tes journaleux d’accompagnement te font une ovation, sur le thème : le chef du gouvernement laissera personne mettre encore dix grands baffes dans la gueule des pauvres, ça serait pas humain, sans déconner - ça sera cinq grandes baffes, grand maximum.


C’est comme ça que François Fillon a tranquillement déclaré, hier soir, au jité de chez France 2 : « Je ne me résous pas à une augmentation de 10% du prix du gaz en janvier. »

Puis d’ajouter : « Je le dis clairement, je ne l’accepterai pas. »

Puis de conclure : « Ça sera très inférieur à cette somme de 10% - je souhaiterais même que ça soit en dessous de la moitié. »

Puis de constater, ce matin, au réveil, que ses journaleux d’accompagnement lui savaient un conséquent gré d’avoir si courageusement promis qu’il n’accepterait pas une hausse de 10% du prix du gaz - et toi, salaud de pauvre : qu’est-ce que t’attends, pour dire merci ?

Notes

[1] Nous parlons ici du talonnetté personnage qui a déclaré, le 6 avril 2004 : « On ne viendra pas à la privatisation, c’est clair, simple, et net. Il n’y aura pas de privatisation de Gaz de France ». Puis qui a précisé, un mois et demi plus tard, le 15 juin 2004 : « Il est clair que Gaz de France doit pouvoir lutter à armes égales avec ses concurrents. Pour cela, nous devons le transformer, d’établissement public en société anonyme ». Moyennant quoi, c’est pour lui que t’as majoritairement voté en 2007, remember : j’ai honte pour toi.
[2] Dont la pénible mais innée propension à la geignarderie a de longue date été montrée par Serge Joffrin et Laurent July.

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