mardi 19 juillet 2011

Adoption de la loi sur la mobilisation des milices en cas de "crise majeure"

douce france

Complétant les dispositions de la Loppsi, et en particulier son article 113 instituant des milices para-policières, le Parlement a adopté une loi "tendant à faciliter l’utilisation" de ces "réserves", "en cas de crise majeure". Rappelons que dans sa version d’origine ce texte prévoyait que les dites "réservistes", mobilisables ponctuellement pour des périodes de trente jours, soient rémunérés par leurs employeurs d’origine au titre de
ce qui était appelé un "mécénat patriotique" bénéficiant de dégrèvements d’impôts sur le modèle des dispositions encadrant le mécénat. Cette dimension financière a été écartée par le Sénat, semble-t-il du fait d’objections du Medef. Et la question a été renvoyée à la loi des finances qui doit être votée en fin d’année.

Soulignons ici que ce texte, présenté après l’accident nucléaire de Fukushima, bien qu’il ait déjà été en préparation avant a été présenté comme une disposition permettant de faire face à ce type de catastrophes. Or, il fait l’économie de préciser ce qu’il entend par "crise majeure", n’excluant aucunement qu’il puisse s’agir de crises politiques ou sociales.

Il n’est pas interdit de mettre en rapport ceci avec le décret datant du 30 juin 2011 qui autorise l’utilisation d’armes à feu contre des manifestants. Là encore, ce décret, s’il précise que l’usage de la force doit être "proportionné" à la menace, n’en prévoit pas moins que des armes de guerre puissent être employées dans le cadre de manifestations publiques y compris lorsque les manifestants sont désarmés.

C’est bien sûr dans le contexte des soulèvements auxquels on assiste depuis la révolution tunisienne qu’il faut lire l’ensemble de ces dispositions qui permettent au gouvernement de mobiliser sans limite, et y compris gratuitement, autant de citoyens qu’il le souhaite pour faire face à des mouvements politiques et sociaux. Ainsi que le prévoit l’article 113 de la Loppsi, et ainsi que cela a pu être dénoncé par le Syndicat général de la police, ces "citoyens volontaires" (ou même pas volontaires "en cas de crise majeure" comme le stipule le texte de loi ci-dessous), "réservistes" de la police ou de la gendarmerie, sont susceptibles d’être armés (et même dotés de pouvoirs de police judiciaire pour certains d’entre eux).

En temps ordinaires, en dehors de "crises majeures", des brigades de miliciens peuvent être amenées à intervenir contre des manifestations pacifiques, ainsi que le DAL semble en avoir fait l’expérience, il y a deux semaines, lors d’une manifestation à la mairie du XIème pour une dizaine de familles ayant un problème de logement. La délégations des mères de familles aura été évacuée de la mairie par une trentaine d’individus munis de brassards "police" dont le comportement – expressions racistes, attitudes "incontrôlables" – indique bien ce que sont de telles "réserves civiles et militaires" : de véritables milices au service de l’État, comme en Egypte, en Syrie ou en Tunisie. Comme en France pétainiste.

Cette énorme construction d’un État milicien – qui repose sur une dizaine de textes différents depuis le livre blanc de la défense et de la sécurité intérieur de 2008 –, restera vraisemblablement comme la plus grande œuvre de l’actuel quinquennat. Il importerait que les forces politiques d’alternance se démarquent de cette politique et s’engagent à abroger l’ensemble de ces dispositions, pour rétablir la possibilité d’un ordre démocratique. Or, il semble bien qu’au contraire le Parti socialiste trouve intéressante cette faculté de mobiliser des citoyens dans de tels contextes, ainsi qu’on a pu le voir lorsqu’il a refusé de mettre en cause l’article 113 de la Loppsi devant le Conseil constitutionnel, et ainsi qu’on le vérifie avec ces premières manifestations de milices devant la mairie du XIème arrondissement de Paris.

Peut-on espérer que la campagne présidentielle qui s’ouvre soit l’occasion des clarifications nécessaires sur ces questions essentielles ?

http://www.libertahastalavictoria.com/article-info-adoption-de-la-loi-sur-la-mobilisation-des-milices-en-cas-de-crise-majeure-79634449.html

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